Peut-on envisager un spectacle sans une part d’illusion ? Moins celle-ci est annoncée et visible, plus grand est l’effet produit sur les esprits. L’illusion comme condition du merveilleux. La cérémonie d’ouverture des JO de Paris en fut le parfait exemple. Elle s’ouvrit avec un rideau bleu-blanc-rouge qui n’était que de la vapeur et s’acheva par une flamme qui n’en était pas une. Certains se demandèrent même si Céline Dion avait vraiment chanté en direct du haut de la Tour Eiffel. Les mauvais esprits. Et pourquoi pas, aussi, une représentation virtuelle de la chanteuse ?
Qui s’était rendu compte, ce dernier vendredi de juillet, vers 23h15, que cet allumage de flamme, sans doute le plus universel et le plus médiatisé qui soit, n’était qu’une illusion provoquée par la rencontre d’une puissante source lumineuse et d’un nuage d’eau ? De la lumière projetée sur de la vapeur. Il fallait y penser. Et puisque, forcément, aucune chaleur ne s’en était dégagée, ce n’était pas elle qui fit monter le ballon auquel la vasque était suspendue et qui n’était donc pas une vraie montgolfière. Tout était électrique. Une idée brillante (dans tous les sens du terme) du designer Mathieu Lehanneur, particulièrement inspiré par son défi et sa coopération avec EDF. On nous avait annoncé une soirée disruptive, nous étions servis.
Tous ceux qui cherchent à illustrer ce qu’est le Design Durable trouveront là matière à réflexion puisque le spectacle proposé portait un message de responsabilité.
Un Design Durable, c’est d’abord du design. Une esthétique forte et identifiable qui attire l’attention et déclenche des émotions comme cette vasque dorée de sept mètres de diamètre et ce ballon aux formes épurées. C’est aussi une manière de concevoir un projet qui ne consiste pas seulement à tenter de reproduire ce qui existe déjà en plus responsable, mais à sortir du cadre attendu pour proposer autre chose. De plus fort, de jamais vu, de symbolique voire, comme ici, de presque spirituel, pour provoquer les esprits, bousculer les référents et, finalement nous emmener ailleurs. Le Design Durable, c’est enfin un design d’étonnement. La combustion n’a certes pas eu lieu mais la lumière qui l’a remplacée nous a apporté une dose d’émerveillement incomparable. La magie l’a emporté sur la réalité. Aucune flamme traditionnelle n’aurait pu provoquer un tel effet.
Qui s’est d’ailleurs plaint de l’absence d’une « vraie » flamme comme auraient pu l’exiger les tenants de la tradition olympique ? Les prétextes à critiques ne manquaient pourtant pas ce soir-là…
